vendredi 18 avril 2014

no sea, no sex, but sun

Putain de temps qui passe.
Il faut vivre.

Demain je serai cloué sur le lit au moment du réveil. Nouvelle période d'insomnie. Mais nous sommes vendredi.
J'ai travaillé deux jours de la maison. Du bonheur. Du boulot mais du bonheur. Le ciel bleu, par dessus les toits, mais pas seulement là. Partout. Et puis la chaleur du soleil.

Cet après-midi j'ai fait une pause. Je suis passé dans le jardin, sur la vieille terrasse en ciment rongée par quelques mauvaises herbes qui profitent de chaque fissure pour s'accrocher.

J'ai posé mon vieux jean informe et mes fesses par terre. J'ai dérangé quelques fourmis. Je me suis appuyé sur le mur de la maison.
De l'herbe, des arbres en fleurs, d'autres plus grands qui balançaient avec la brise.

Le soleil déjà presque bas sur l'horizon brulait. J'ai mis la capuche de mon sweat pour cacher mes joues. Et puis je n'ai plus rien fait.
J'ai laissé le vent, la chaleur, les odeurs, les bruits, la lumière, les couleurs envahirent mon corps. Je vis. C'était comme... je ne sais pas, un moment intense. Un moment où le corps n'a plus de frontière précise avec ce qui l'entoure. C'était comme une perfusion d'énergie.

Demain, le bureau. J'en ai fait le tour. Comme du système. Celui où on n'a pas honte de proposer que les jeunes aient un sous-smic. Celui où on n'a pas honte de proposer que les jeunes sans bourse n'aient plus d'APL. Jusqu'où faudra-t-il aller pour que ça explose ? Mais ça n'explosera pas. Avec les horizons artificiels dont on nous nourrit "être riche", "être célèbre", "posséder", le nivellement forcé par le bas, il n'y aura pas d'explosion. Il suffira d'en prendre un qui manifeste, de le sortir du tas, de le corrompre, pour qu'il appuie à son tour sur les autres.

Je ne changerai rien. Incapable et paresseux. Je vais juste essayer de naviguer sans trop boire la tasse, de trouver des plages de temps en temps, comme cet après-midi, pour reposer ma carcasse vieillissante.

J'ai décidemment passé un cap. Je suis passager de moi-même. Faire du sport me maintient peut-être mais me fait aussi durement réaliser que je suis une monture qui s'use. Mes pensées, mes désirs, mes envies sont prisonniers de ce corps qui impose ses limitations. Je sais, ça semble exagéré, je n'ai pas de handicap physique. Ce que j'essaye de décrire c'est le cap qui fait que l'enveloppe semble trop vieille pour l'âme (ai-je une âme ?) qui l'habite.

C'est ça vieillir, c'est sentir ce décalage entre le corps et l'esprit. Cette envie de vivre si forte parfois. Comme les sursauts d'un condamné.

Il faut dormir, dans 5 heures ce sera un désastre...



mercredi 9 avril 2014

Back on track

Le dialogue,  ça a du bon. On devrait dialoguer plus souvent. D'abord on vide son sac, puis on écoute l'autre et on en prend plein la gueule. Ensuite, on avale et on digère. Et pour finir, on décide de conduites et d'efforts partagés. En ce qui me concerne, je ne passerai plus la matinée entière au sport quand elle vient chez moi. Ça a du sens. Et quand nous serons ensemble, nous serons réellement ensemble, pas au téléphone avec les enfants. Et quand nous déciderons d'un weekend ou d'une soirée,  nous expliquerons aux enfants que nous les aimons beaucoup mais que nous avons aussi droit à une vie et à des projets... c'est parti.

mardi 8 avril 2014

Suite ou fin ?

Nous avons discuté de cet épisode du restaurant.
Elle était bien consciente de l'absurdité de la situation.
Sa fille ne voulait pas manger avec nous car sa sœur et Miss Ado discutent sans lui accorder la moindre attention quand elles se voient. Mais elle voulait manger au Smokey Bones.

Mon amie aurait dû donc choisir entre lui imposer soit un repas en commun, soit un autre restaurant.

Elle aurait aussi pu m'en parler.

L'affaire à fait ressurgir de vieux fantômes. Elle a mis en évidence le peu d'intérêt de notre vie "de couple".

Il est vrai que je n'ai pas grand chose à offrir. Et qu'elle n'est pas très démonstrative.
Pourtant, des sentiments demeurent. Sinon, nous ne serions plus ensemble depuis longtemps.

Depuis, nous réfléchissons. Essayer de repartir différemment ? Ou mettre fin à l'histoire ?

dimanche 6 avril 2014

Nul et archi nul

- Tu as qui finalement ce soir ?
- Miss Ado. Et mon père bien sûr.
- Vous allez manger où ?
- Au "Smokey Bones" je pense. Et que faites-vous ce soir ?
- C'est l'anniversaire d'Isabelle demain, on va manger dehors aussi, mais Isabelle voudrait que nous ne soyons que toutes les trois. Sinon je t'aurais proposé que l'on mange ensemble.
Je ne trouve rien à répondre à cela, vouloir se retrouver entre filles - mère et filles - pour un repas d'anniversaire, pourquoi pas.
- Ok, on se rappelle plus tard parce que là je suis au bord de route, je suis en moto, il y a du trafic et c'est très bruyant.
- D'accord, bonne balade.
- Merci, mais je vais rentrer, il est déjà 18h30.

Des mois que je n'avais pas sorti cette moto. Je me suis fait voler mon vélo de route (on ne dit pas vélo de course) la semaine dernière, dans ma cour, devant ma porte. Je ne le laisse jamais dehors et cette expérience me prouve que j'ai raison. Mais là, je l'ai fait... J'habite dans une impasse, dans un quartier calme. Mais dimanche dernier, au retour de l'entrainement avec le club, j'étais fourbu. 77 km à suivre les flèches comme je pouvais, me faisant distancer dans les côtes, sans pouvoir m'accrocher au peloton, redoublant d'effort dans les descentes (du bonheur) et sur le plat pour "recoller" au groupe, m'avait passablement fatigué.
J'ai posé le vélo devant la porte, pour le nettoyer, et puis j'ai pris une douche et j'ai dû préparer à manger pour l'aîné des aînés, mon père.
J'ai oublié le vélo... Je ne sais pas quand il est "parti", mais en fin d'après-midi, quand j'ai ouvert la porte, il n'était plus là.
Ce n'est qu'un vélo. Il y a plus grave. Bien sûr. Mais c'est contrariant. Nette augmentation des vols dans la ville et les communes alentours. Une connaissance travaillant au tribunal l'a confirmé sans peine. Des vols parfois commis par des enfants, l'adulte attendant plus loin.
ça n'arrange pas mon opinion sur la prolifération de la racaille et des incivilités. Vols de vélo, de mobilier de jardin de tout ce qui peut se revendre. Parasites malsains qui génèrent un sentiments d'insécurité tout aussi malsain. Méfiance, défiance. Nous n'allons pas vers la fraternité et la tolérance.

J'ai pris l'autoroute pour rentrer. Retrouver une position confortable sur cette machine trop nerveuse et trop rapide. A 130 km/h, je ne suis qu'à 46% de sa vitesse maximale. Mais non, ne pas tourner la poignée, ne pas me transformer en délinquant de la route, ne pas mettre ma vie en danger non plus. C'est frustrant mais ce n'est pas nouveau. Il y a des circuits pour lâcher les chevaux. Je double juste une voiture qui se met à accélérer quand je la dépasse - phénomène que j'ai souvent observé, comme si on attentait à l'honneur du conducteur en dépassant son véhicule, sorte de prolongation en tôle et pistons de lui-même - et "m'oblige" à risquer l'infraction (non, honnêtement, le risque à lui aussi été dépassé...).

Quand j'arrive à la maison, la porte s'ouvre. Il est 19h et quelques minutes. Mon père ouvre la porte avant que je n'ai posé les eux pieds au sol. C'est l'heure à laquelle il ouvre toutes les portes pour trouver une personne qui le renseigne sur l'imminence du repas. Et comme il a entendu un bruit de moteur, il a ouvert la porte d'entrée, sans aucune vérification, malgré la mise en garde placée sur les verrous, écrite en grosses lettres, qui précise de n'ouvrir à personne et malgré le rappel des consignes faites plus tôt dans l'après-midi. La tête ne retient plus grand chose et les raisonnements, les réflexions sont souvent absentes, de plus en plus souvent absentes. Les réactions sont instinctives : J'entends un bruit, je vais voir. On sonne ? Je vais ouvrir.

J'appelle Miss Ado.
- Ma grande, on va aller manger dehors.
- On y va là ? Demande mon père.
- Oui, juste deux minutes, je change de blouson et de chaussures, mais on y va effectivement maintenant.
- Je vais aller aux toilettes alors.
- D'accord, vas aux toilettes.

De la voiture, dans la cour, je décroche le téléphone, dont la sonnerie raisonne dans les haut-parleurs.
- Vous êtes déjà au resto ? Me demande mon amie. j'entends un brouhaha derrière elle.
- On y va là, je viens de rentrer.
- Nous y sommes déjà. Nous sommes au Smokey Bones, Isabelle voulait manger là. on va peut-être s'apercevoir.
- On ne va pas se retrouver dans le même restaurant à deux tables différentes, c'est nul ! Ma voix doit montrer une certaine contrariété.
- Isabelle voulait que l'on mange toutes les trois ensembles. Ce n'est pas grave si on se croise, on se dira bonjour.
Non, ça ne risque pas d'arriver. Je maintiens, c'est nul. Je raccroche en abrégeant la conversation. C'est nul, archi nul. Et cette fois je suis d'avoir raison. Nul et re-nul.

Dans la voiture c'est le silence.
- Où allons-nous ?
Je pose surtout la question à Miss Ado qui comprend que nous n'irons pas au Smokey Bones. Elle a acquiescé mon jugement de la situation.
- On va où vous voulez dit gentiment mon père.
- Oui, on cherche une idée. Tu as une préférence ma grande ?
- Non, je ne sais pas trop.
- Tu connais l'Xcellence ?
- Non.
- On pourrait essayer. C'est moyen mais ça ira.
Je tente de me souvenir s'il y a sur la carte un plat "mou" pour mon père, un plat qui évite qu'il ne crache dans son assiette les morceaux trop durs...
- On va où vous voulez, répète mon père. C'est toujours bien où nous allons.
- C'est gentil, on cherche encore.
Et nous passons devant le "McDaffyDuck"*. J'y gare la voiture. Miss Ado ne voit pas d'inconvénients à manger un burger et une glace. Je prends une salade mais je prends aussi une glace. La bouffe me défoule. Plus d'alcool, plus de cigarettes, pas de baise, alors je bouffe du sucre.

En partant, mon père me dit : "C'est moi qui vous invite".
- C'est gentil papa, mais ici on paie à la commande...
Mais c'est effectivement gentil. Surtout que je surveille mes dépenses depuis hier. J'ai gagné un rappel d'impôts sur 3 ans. Et je n'ai rien à dire. Je me suis effectivement trompé de cases. Au lieu de remplir la 6YQ, j'ai rempli la 7ZT*. Jolie somme à rembourser. Du coup, le projet de vacances s'est envolé. Une lettre, un chiffre et un touriste en moins.

De retour à la maison, je me demande comment expliquer à quelqu'un qui n'a pas le même jugement que vous,  qu'une situation vous paraît anormale ? Manger en même temps dans le même restaurant quand on est "ensemble", c'est aberrant. Notre relation serait secrète, passe encore. Mais non, nous nous connaissons tous et il n'y a pas d'incompatibilité d'humeur connue.

Il faudrait se rendre à l'évidence. Avoir le courage de lui dire que ça ne ressemble à rien. Mais le pire c'est que la dernière fois que j'ai évoqué ce point, elle ne semblait pas vouloir d'une rupture. Par lâcheté ? Ou parce que la situation lui convient ?

Ne pas vouloir la contrarier en ce moment à cause des problèmes de santé de son père et des siens va trouver ses limites.

Moi, je n'ai pas envie d'un truc tiède, insipide et informe.
J'ai 50 ans mais je vis. Je peux vibrer - je l'ai constaté - être heureux et malheureux, sentir mon cœur s'emballer, désirer, être aimer et aimer.

Vivre avant de mourir, ça me semble assez sensé et logique. D'abord vivre. Le temps de mourir viendra forcément un jour. Alors, penser à vivre. Emettre et recevoir des émotions vives.

Le jour tarde à poindre avec ce changement d'heure. Déjà plus de trois heures d'éveil. J'avais dit que j'irai courir. Faire au moins 15 km pour changer des séances courtes. Vite, recharger les batteries de mon  lecteur mp3. Et puis recharger les miennes ensuite.


*Les cases ont été changées...
**Le nom a été changé...

mardi 1 avril 2014

L'incroyable rencontre

Il y a plus de 10 ans, j'avais dans mon "service" une jeune ingénieur, dynamique et déjantée.  Une grande fille, mince et rousse. Dynamique à vous fatiguer mais à effacer l'ennui aussi. Nous nous entendions bien. J'étais son supérieur et nous gardions une distance "protocolaire". Lors d'un salon, comme nous le faisons à l'époque, nous étions sortis entre collègues et avions éclusés quelques bars avant de finir dans une boîte de nuit. Nous avions juste dansé un slow, mais il avait suffit à révéler une attirance réciproque et nos corps avaient trouvé douloureux la rupture au retour des rythmes musicaux plus soutenus. Par la suite,  rien d'autres que quelques mots échangés avec les yeux n'avaient trahis cet instant charnel bref mais révélateur.

Ce matin, je revenais de la machine à café,  mon gobelet déformé par la boisson trop chaude à la main, quand une voix m'a interpellé. J'ai stoppé mon pas et je maudissais déjà celui qui me contraignait à me brûler les doigts plus encore,  quand je l'ai vu. Elle était là, à côté de lui, celui qui mavait appelé pour me la presenter, grande, mince, rousse et souriante, semblant effacer tout ce qui était autour d'elle. Je me suis avancé, la gorge un peu serrée, sans la quitter des yeux. j'ai prononcé son prénom. Son sourire s'est agrandi pendant que j'essayais de retrouver une attitude neutre. Nous avons plaisanté,  j'ai demandé ce qu'elle faisait là :
- un remplacement, pour 4 à 6 mois, m'a-t-il été répondu.
- Tu seras là à midi ?
- oui mais j'irai m'acheter un sandwich en ville avant.
- Nous irons ensemble, je dois m'en prendre un aussi.

 A midi, nous n'avons pas pris de sandwich. Tout est allé très vite. J'ai garé la voiture sur le parking désert ou je me repose parfois. Nos corps brûlaient.  Tout ce que nous avions revé de découvrir et partager il y a 10 ans l'a été à cet instant.

J'ai encore l'image de sa tête rejetée en arrière et de sa longue chevelure rouge glissant sur ses épaules pendant qu'elle me chevauchait, mes mains sous ses cuisses, son tailleur remonté sur ses hanches.

Après,  nous sommes restés silencieux, apaisés, elle appuyée contre moi, écoutant les bruits des oiseaux et du vent dans les arbres par les fenêtres ouvertes.

Je l'ai déposée sur un parking non visible des bureaux et je suis allé me garer plus loin.

Nous nous sommes revus brièvement à la fin de la journée à l'écart de l'usine,  sur une aire de repos. Nous avons parlé. Comment nous voir sans éveiller les soupçons au bureau ? Nous y arriverons. Et puis nous sommes rentrés, chacun dans sa direction, massacrant nos claviers de téléphone à coup de SMS dont même des adolescents auraient honte...