- Tu as qui finalement ce soir ?
- Miss Ado. Et mon père bien sûr.
- Vous allez manger où ?
- Au "Smokey Bones" je pense. Et que faites-vous ce soir ?
- C'est l'anniversaire d'Isabelle demain, on va manger dehors aussi, mais Isabelle voudrait que nous ne soyons que toutes les trois. Sinon je t'aurais proposé que l'on mange ensemble.
Je ne trouve rien à répondre à cela, vouloir se retrouver entre filles - mère et filles - pour un repas d'anniversaire, pourquoi pas.
- Ok, on se rappelle plus tard parce que là je suis au bord de route, je suis en moto, il y a du trafic et c'est très bruyant.
- D'accord, bonne balade.
- Merci, mais je vais rentrer, il est déjà 18h30.
Des mois que je n'avais pas sorti cette moto. Je me suis fait voler mon vélo de route (on ne dit pas vélo de course) la semaine dernière, dans ma cour, devant ma porte. Je ne le laisse jamais dehors et cette expérience me prouve que j'ai raison. Mais là, je l'ai fait... J'habite dans une impasse, dans un quartier calme. Mais dimanche dernier, au retour de l'entrainement avec le club, j'étais fourbu. 77 km à suivre les flèches comme je pouvais, me faisant distancer dans les côtes, sans pouvoir m'accrocher au peloton, redoublant d'effort dans les descentes (du bonheur) et sur le plat pour "recoller" au groupe, m'avait passablement fatigué.
J'ai posé le vélo devant la porte, pour le nettoyer, et puis j'ai pris une douche et j'ai dû préparer à manger pour l'aîné des aînés, mon père.
J'ai oublié le vélo... Je ne sais pas quand il est "parti", mais en fin d'après-midi, quand j'ai ouvert la porte, il n'était plus là.
Ce n'est qu'un vélo. Il y a plus grave. Bien sûr. Mais c'est contrariant. Nette augmentation des vols dans la ville et les communes alentours. Une connaissance travaillant au tribunal l'a confirmé sans peine. Des vols parfois commis par des enfants, l'adulte attendant plus loin.
ça n'arrange pas mon opinion sur la prolifération de la racaille et des incivilités. Vols de vélo, de mobilier de jardin de tout ce qui peut se revendre. Parasites malsains qui génèrent un sentiments d'insécurité tout aussi malsain. Méfiance, défiance. Nous n'allons pas vers la fraternité et la tolérance.
J'ai pris l'autoroute pour rentrer. Retrouver une position confortable sur cette machine trop nerveuse et trop rapide. A 130 km/h, je ne suis qu'à 46% de sa vitesse maximale. Mais non, ne pas tourner la poignée, ne pas me transformer en délinquant de la route, ne pas mettre ma vie en danger non plus. C'est frustrant mais ce n'est pas nouveau. Il y a des circuits pour lâcher les chevaux. Je double juste une voiture qui se met à accélérer quand je la dépasse - phénomène que j'ai souvent observé, comme si on attentait à l'honneur du conducteur en dépassant son véhicule, sorte de prolongation en tôle et pistons de lui-même - et "m'oblige" à risquer l'infraction (non, honnêtement, le risque à lui aussi été dépassé...).
Quand j'arrive à la maison, la porte s'ouvre. Il est 19h et quelques minutes. Mon père ouvre la porte avant que je n'ai posé les eux pieds au sol. C'est l'heure à laquelle il ouvre toutes les portes pour trouver une personne qui le renseigne sur l'imminence du repas. Et comme il a entendu un bruit de moteur, il a ouvert la porte d'entrée, sans aucune vérification, malgré la mise en garde placée sur les verrous, écrite en grosses lettres, qui précise de n'ouvrir à personne et malgré le rappel des consignes faites plus tôt dans l'après-midi. La tête ne retient plus grand chose et les raisonnements, les réflexions sont souvent absentes, de plus en plus souvent absentes. Les réactions sont instinctives : J'entends un bruit, je vais voir. On sonne ? Je vais ouvrir.
J'appelle Miss Ado.
- Ma grande, on va aller manger dehors.
- On y va là ? Demande mon père.
- Oui, juste deux minutes, je change de blouson et de chaussures, mais on y va effectivement maintenant.
- Je vais aller aux toilettes alors.
- D'accord, vas aux toilettes.
De la voiture, dans la cour, je décroche le téléphone, dont la sonnerie raisonne dans les haut-parleurs.
- Vous êtes déjà au resto ? Me demande mon amie. j'entends un brouhaha derrière elle.
- On y va là, je viens de rentrer.
- Nous y sommes déjà. Nous sommes au Smokey Bones, Isabelle voulait manger là. on va peut-être s'apercevoir.
- On ne va pas se retrouver dans le même restaurant à deux tables différentes, c'est nul ! Ma voix doit montrer une certaine contrariété.
- Isabelle voulait que l'on mange toutes les trois ensembles. Ce n'est pas grave si on se croise, on se dira bonjour.
Non, ça ne risque pas d'arriver. Je maintiens, c'est nul. Je raccroche en abrégeant la conversation. C'est nul, archi nul. Et cette fois je suis d'avoir raison. Nul et re-nul.
Dans la voiture c'est le silence.
- Où allons-nous ?
Je pose surtout la question à Miss Ado qui comprend que nous n'irons pas au Smokey Bones. Elle a acquiescé mon jugement de la situation.
- On va où vous voulez dit gentiment mon père.
- Oui, on cherche une idée. Tu as une préférence ma grande ?
- Non, je ne sais pas trop.
- Tu connais l'Xcellence ?
- Non.
- On pourrait essayer. C'est moyen mais ça ira.
Je tente de me souvenir s'il y a sur la carte un plat "mou" pour mon père, un plat qui évite qu'il ne crache dans son assiette les morceaux trop durs...
- On va où vous voulez, répète mon père. C'est toujours bien où nous allons.
- C'est gentil, on cherche encore.
Et nous passons devant le "McDaffyDuck"*. J'y gare la voiture. Miss Ado ne voit pas d'inconvénients à manger un burger et une glace. Je prends une salade mais je prends aussi une glace. La bouffe me défoule. Plus d'alcool, plus de cigarettes, pas de baise, alors je bouffe du sucre.
En partant, mon père me dit : "C'est moi qui vous invite".
- C'est gentil papa, mais ici on paie à la commande...
Mais c'est effectivement gentil. Surtout que je surveille mes dépenses depuis hier. J'ai gagné un rappel d'impôts sur 3 ans. Et je n'ai rien à dire. Je me suis effectivement trompé de cases. Au lieu de remplir la 6YQ, j'ai rempli la 7ZT*. Jolie somme à rembourser. Du coup, le projet de vacances s'est envolé. Une lettre, un chiffre et un touriste en moins.
De retour à la maison, je me demande comment expliquer à quelqu'un qui n'a pas le même jugement que vous, qu'une situation vous paraît anormale ? Manger en même temps dans le même restaurant quand on est "ensemble", c'est aberrant. Notre relation serait secrète, passe encore. Mais non, nous nous connaissons tous et il n'y a pas d'incompatibilité d'humeur connue.
Il faudrait se rendre à l'évidence. Avoir le courage de lui dire que ça ne ressemble à rien. Mais le pire c'est que la dernière fois que j'ai évoqué ce point, elle ne semblait pas vouloir d'une rupture. Par lâcheté ? Ou parce que la situation lui convient ?
Ne pas vouloir la contrarier en ce moment à cause des problèmes de santé de son père et des siens va trouver ses limites.
Moi, je n'ai pas envie d'un truc tiède, insipide et informe.
J'ai 50 ans mais je vis. Je peux vibrer - je l'ai constaté - être heureux et malheureux, sentir mon cœur s'emballer, désirer, être aimer et aimer.
Vivre avant de mourir, ça me semble assez sensé et logique. D'abord vivre. Le temps de mourir viendra forcément un jour. Alors, penser à vivre. Emettre et recevoir des émotions vives.
Le jour tarde à poindre avec ce changement d'heure. Déjà plus de trois heures d'éveil. J'avais dit que j'irai courir. Faire au moins 15 km pour changer des séances courtes. Vite, recharger les batteries de mon lecteur mp3. Et puis recharger les miennes ensuite.
*Les cases ont été changées...
**Le nom a été changé...
Ouais... ben parfois on pourrait presque écrire le même billet le même jour, toi et moi...
RépondreSupprimerSauf pour le sport, bien sûr :)
Ben dis donc....Vous êtes "ensemble", dis tu?
RépondreSupprimerBon courage quand même..pour le reste!!
Je confirme, c'est nul ! J'aurais fait pire si j'avais été seule je crois bien. Je suis du genre à aller dans le restau et à me coller à la table à côté de la leur. Une peste quoi :-)
RépondreSupprimerJe crois même que j'aurais fait pire si j'avais été accompagné. Je peux être une vraie garce. (Ce qui peut faire rire mon mari, il sait que je suis un peu nerveuse).
J'ai fait 2km à la piscine vendredi, ça m'a défoulée, je crois que j'aurais bien besoin ce soir d'en faire 3 tellement ma journée a été injuste.
Pour la moto, heureusement que je n'ai pas de permis ! Heureusement, sinon je n'aurais plus de permis :-) Jamais je n'accélère quand un motard me double, jamais. Par contre j'ai du mal à me laisser doubler... Je vais vite, trop vite, beaucoup trop vite. Ma voiture est faite pour, mais tout de même, parfois, j'abuse un peu dans les virolos de ma campagne...
Allez, hop, une glace pour te consoler.
Quel dommage pour ton vélo !