Ne pas dormir. Il n’est que 21h00. J’ai fait 1h30 ?
2h de sieste ? Bien sûr, je me suis réveillé à 6h00 mais ça n’a rien
d’extraordinaire.
Je suis fatigué. Des « coups de barre ». Quand
je vais manger sur mon parking le midi, je dors souvent.
Ma vue baisse. Difficile de lire sans lunettes, même mon
écran d’ordinateur. Mais j’ai du mal à supporter mes lunettes : système
qui, s’il ne s’appelle pas progressif, doit y ressembler. Je m’en suis rendu
compte cette semaine seulement alors que j’ai cette paire depuis des années
maintenant. Mais je n’arrive pas à les utiliser, j’ai l’impression de voir flou
dès que mes yeux quittent le centre des verres. Il faut que je garde mon regard
fixe et que j’oriente ma tête vers ce que je veux regarder. Très peu pratique.
Je me plains. Il n’y a pourtant pas vraiment de raisons
de le faire.
Je vieillis et c’est toujours la même litanie.
Je vais poser 4 semaines de congés. Ce qui m’a retenu de
le faire jusqu’à présent – je n’ai posé que 3 semaines pour l’instant – ce sont
les 2 rendez-vous médicaux pour mon père qui vont m’obliger à poser deux
demi-journées.
Combien de demi-journées posées pour aller à l’hôpital ou
chez le médecin ?
Allons, cessons ces jérémiades.
Demain, triathlon M, avec des côtes en vélo. Je vais
souffrir, regretter d’y être allé, me dévaloriser et puis, plus tard, je serais
bien content d’avoir participé. Et dois-je l’avouer, les belle triathlètes
ajouteront à l’état de grâce qui suit l’effort.
Je ne dessine plus, je gribouille. Des conneries vite
faites mal faites, qui ne font rire que moi et mes enfants (enfin, certains d’entre
eux). Je crée, je vis…
Les enfants qui ne sont pas là ce week-end. Et par
conséquent, bien que nous soyons samedi, nous ne sommes pas allés au restaurant.
La perspective de me retrouver seul avec mon père à une table ne m’enchantait
pas.
Je me souviens quand j’étais jeune – et non pas « plus jeune »
… - je voyais parfois de ces étranges couples de mère ou père âgé accompagné de
leur enfant de 45 à 60 ans. Des couples qui ne parlaient pas, qui me semblaient
d’une tristesse infinie. L’expression d’un ratage, d’accident de la vie. Jugement
sévère d’un jeune adulte arrogant qui ne connaissait rien de la vie.
Voilà que le raté au regard des prétentieux comme celui
que j’étais, c’est moi. Le quinqua qui
vit avec son père.
Hier soir, j’ai acheté des McDo aux enfants et à mon père
et j’ai fui ! Mon amie et moi avons mangé dans un restaurant Thaï calme et
peu fréquenté. Les gens ne savent pas que le propriétaire a changé il y a deux
ans - ou ils préfèrent l’usine - où nous allons parfois à ma grande honte – qui
propose un buffet sans finesse mais copieux.
J’ai aimé voir une petite étincelle de bonheur de ses
yeux. J’ai aimé quand elle m’a dit qu’elle allait se débrouiller pour venir
dormir chez moi tous les mardis.
Equilibre – fragile ? – que nous avons trouvé dans
notre curieuse relation. Elle m’aime, je vis…
Nous allons essayer de partir un week-end. Ce ne sera ni
à la mer ni à la montagne. Nous irons vois les 3 derniers cousins avec lesquels
je suis encore en contact. Une cousine dont je n’ai jamais vu l’enfant depuis
son baptême – honte à moi – et ceux de mon côté maternel avec qui j’ai renoué
après combien d’année déjà ? 20 ans ? 23 ans ?
Putain de vie qui passe si vite. Je ne sais même pas dire
comment j’ai gâché une grande partie de celle-ci. De ma famille, mes « origines »
familiales, il ne reste rien. Ceux qui savaient sont partis ou ne savent plus. Je
n’ai ni écouté ni noté quand ils racontaient. Vieilles histoires de vieilles
personnes, qui ne prennent leur pleine valeur que quand elles s’effacent. Curieux
sentiment d’avoir perdu une partie de son histoire.
Je connais des bribes, insuffisantes pour retracer un
chemin, trop peu précises pour être utiles.
Pourquoi le passé devient-il si important ? Est-ce
le fait de prendre conscience que l’oubli va m’absorber comme il en a absorbé
plein d’autres avant moi ? Est-ce une façon de chercher à se rassurer ? Je
me souviens du passé, de la route de ceux qui m’ont précédé, ce sera pareil
pour moi ?
Et quelle importance ?
J’ai peur du trou, c’est tout. Et de ce qui va le
précéder.
La mort. L’amour avant la mort. Un autre corps à rassurer
et auprès duquel se rassurer. Des enfants à ne pas perdre des yeux, à protéger.
Et puis la sueur avant la mort. Je sue, je vis…
Demain, je cours.
Je cours, je vis…
Vivre.